À la rencontre de… Boris Vallaud

Député des Landes et porte-parole du Parti Socialiste

À quel âge vous êtes-vous engagé en politique ? Qu’est-ce qui a motivé cette volonté de s’engager ?

Formellement tard, j’ai adhéré au Parti socialiste à 41 ans, en 2016, même si j’en étais le compagnon de route depuis des années déjà. J’ai franchi le pas parce que c’était pour moi le moment d’une participation plus directe à un combat qui s’annonçait difficile pour la gauche. Face à l’extrême droite et au libéralisme, au seuil d’un monde au bord de se défaire, ce n’était pas le moment de se planquer.

Est-ce toujours cette même motivation qui vous pousse à poursuivre votre engagement ?

Oui, elle est intacte car je ne vois pas d’autre chemin que celui de la justice pour affronter l’explosition des inégalités et le changement climatique.  

Crédit Photo : Mathieu Delmestre

Tout ce que nous avons accompli depuis deux siècles peut se défaire. Pour moi, la République sociale reste un idéal jamais achevé.

 

Vous êtes membre du Parti Socialiste, pourquoi ce choix ?

Je suis attaché aux idées plus qu’aux structures : je suis intimement socialiste car je crois à la modernité de ce que le socialisme porte dans un monde au seuil de grandes mutations. Je crois à la transformation sociale comme condition de transformation de la condition humaine. Le meilleur est pour moi toujour devant nous.

Quelles sont les valeurs, enjeux, batailles qui vous tiennent à cœur et que vous défendez à travers votre engagement ?

La question sociale, les inégalités, la justice sont mes valeurs et mes combats, profondément. Je vois dans la construction d’une société plus juste, plus égalitaire, plus fraternelle le chemin de notre cohésion contre toutes les formes de discordes qui la divisent et la fractionnent. Les sociétés les plus égalitaires sont aussi les plus heureuses. Le bonheur peut être une ambition politique sans être une ambition totalitaire.

Vous semblez engagé en politique pour défendre la jeunesse, pouvez vous nous en dire plus ?

Oui, penser à la jeunesse, c’est le plus sûr moyen de ne pas sacrifier l’avenir. Les enjeux qui lui font face sont considérables et il faut donner à la jeunesse les moyens de les surmonter. Ça n’est pas facile d’avoir 20 ans en 2020 disait Emmanuel Macron, mais c’est dur en général. La jeunesse est souvent un rite initiatique un peu cruel et les adultes ont tendance à considérer que cela forge le caractère… Pas moi. Je veux une jeunesse qui ait les moyens de son émancipation. Une fois émancipée, elle connaîtra ses devoirs et ses responsabilités et les accomplira en citoyens pleins et entiers.

De votre point de vue de député, comment voyez vous la relation entre les jeunes et la politique ?

Elle est souvent ambivalente, avec parfois une méfiance réciproque. Ce n’est pas mon sentiment personnel mais je le ressens, comme cela de ce que j’observe. Regardez pour vous en convaincre : en refusant l’ouverture du RSA à 18 ans, on fait passer les devoirs de la jeunesse avant ses droits, tandis que le SNU a quelque chose d’une caporalisation de la jeunesse… ce n’est pas ma façon de voir les choses.

Que répondriez vous aux jeunes qui considèrent que “ça sert a rien de s’engager” ?

Que la somme de ceux qui ne veulent pas s’engager ça fait déjà un très gros parti ! Comme les abstentionnistes… s’engager c’est aussi faire la démonstration que si, au contraire, ça peut servir à quelque chose. Plus de deux siècles de progrès sont la somme de l’engagement de millions de femmes et d’hommes ! Il y a plusieurs façons de s’engager aujourd’hui, chacun peut trouver la sienne.

Pouvez-vous expliquer à quoi sert un député ?

C’est une bonne question ! Nous sommes censés construire la loi, la voter et contrôler l’action du gouvernement… Mais dans cette Ve République à bout de souffle et aux pouvoirs hyper-déséquilibrés, il y a des jours où je me pose malheureusement la question de notre véritable utilité… Nous sommes un parlement très faible dans une grande démocratie et ce n’est ni normal, ni sain, ni efficace. Aujourd’hui mon rôle est essentiellement d’être un “lanceur ou relayeur d’alerte” politique, au Parlement et dans le débat public. J’essaye de porter la voix de celles et ceux qui sont oubliés par le gouvernement d’Emmanuel Macron, que ce soit les habitants des zones rurales de chez moi dans les Landes ou les plus précaires partout en France, et notamment les jeunes.

24h avec Boris Vallaud, ça ressemble à quoi ?

C’est mouvementé ! Je suis la moitié de ma semaine à Paris et l’autre moitié dans les Landes. Quand je suis à Paris, je demande à mon équipe de ne rien mettre à l’agenda trop tôt car c’est un moment où je peux vraiment profiter et m’occuper de mes enfants, j’y tiens beaucoup. Ensuite, je rencontre ceux qui me sollicitent ou que je souhaite rencontrer pour travailler sur des idées, des propositions. Nous avons fourni un travail important depuis 2017 au groupe “socialistes et apparentés” de l’Assemblée, bien plus solide que d’autres groupes politiques je pense. Enfin, évidemment, il y a toute la partie purement parlementaire qui occupe la majeure partie du temps : l’examen des textes de loi, le travail en commission, les questions au gouvernement, les conférences de presse, etc. Et quand un texte de loi est examiné, il n’est pas rare de terminer les journées très tard. Dans les Landes, la fonction de député est très différente et pour autant totalement indispensable : je reçois les habitants de ma circonscription qui le demandent à ma permanence, je me rends sur place pour voir des entreprises, restaurateurs, agriculteurs, centres de santé, je viens là où on me demande, là où on pense que je peux être utile, où ça ne va pas, je soutiens des projets, je prends le pouls de ce qui se passe et dont on ne parle pas ou pas assez.

Quelle est votre solution pour renouer le contact entre les jeunes et la politique ?

La grande question. S’il existait une solution miracle, toute simple, je pense que ce serait déjà fait. Sur ce sujet, je pense que les jeunes sont des Français comme les autres : ils s’intéresseront à la politique quand ils auront l’impression que s’y intéresser peut changer la politique et surtout changer leur vie. Là où c’est dramatique, c’est que les jeunes, qui seront les premiers concernés demain par les décisions politiques prises aujourd’hui, s’y intéressent moins que les autres. Et cela peut difficilement conduire à proposer des véritables mesures fortes pour la jeunesse. Pour renouer, il faut commencer par arrêter les injonctions à la jeunesse, par arrêter de parler à sa place, et commencer à aller la voir, l’entendre, l’écouter, et lui parler normalement. C’est ce que nous avons décidé de faire : avec mon collègue Hervé Saulignac, nous avons entamé un tour de France de la jeunesse.

 

Propos recueillis par Rémi Casalis.

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